jeudi 6 octobre 2016

VERSO N°166 : DE PLUME & DE SABLE


Au sommaire de ce numéro :
Pascale Flavigny, Laetitia Lecoeur, Patrice Blanc, Saslac, Clément Bollenot, Marie-Laure Adam, Estelle Gillard, Elodie Loustau, Dominica Miquiaux-Triquet, Anne-Marguerite Michel, Lorraine Pobel, Sylvie Righetti, J. F. Grossard, Florence Picard, Florian Tomasini, Anaïs Karouëne, Dirk Christiaens, Muriel Carrupt, Rébecca Gruel, Patrick Chouissa, François Charvet, François Sannier, Malibert, Tristan Allix, Christophe Petit, Farid Bahri, Geneviève Vidal, Philippe Mollaret, Mélanie Fourgous, Yves Bressande, Eric Savina, McDem, Antoine Durin, Gérard Lemaire

PREFACE (Extrait) :


Il était souvent question de plume et de sable. D’emblée quelque chose de dansant, léger, fuyant se manifestait d’une page à une autre. Le sable, c’était celui du chemin. Pascale  Flavigny m’a inspiré ce titre précis. Conjugué, décliné comme en rêve tout au long de ce livre. Le corps se forme en chemin, dit Patrice Blanc.

Et coule le sable du temps, même si les chemins se séparent. Pour les uns, c’est l’amorce de l’infini, pour les autres, un cul de sac. «Car nés de routes et de doutes il n’y a nulle part où aller», dit Clément Bollenot. La danse est là pour conjurer cette malédiction, peut-être. Marie-Laure Adam sur la plage médite sur ce sable qui ne retient qu’une courbure intime. Du corps au sable il n’y a qu’un pas que le sable ne gardera pas ! Estelle Gillard met en scène un Maupassant qui sent sa mort imminente et puis un professeur qui s’est amouraché d’une jeunesse et sait qu’il est perdu lui aussi. Il en rit. Philosophie du gouffre dit-elle !  (...)


EXTRAIT :

élodie loustau

Poser le souffle

Sur le fil de la démesure, jamais de repos.

                                Temps usé.

Entre vice et délice il avance.
Pas feutrés, silencieux dans le brouillard. Retenir son souffle. Non. Puiser la vie dans ce corps sublimé par la peur. Creuser le sillon de la respiration. Ce mouvement, va-et-vient, léger et tonitruant. Aller le chercher, sans effort apparent. Au plus profond.

Il avance.

Les orteils craquellent à l’affût de la moindre saveur. Posés sous la pâleur du soir. Bouillonnants. Frétillants. Un frémissement d’ongle le force à s’arrêter un instant. Le cou se libère, le visage s’illumine, le dos se redresse. Regard franc vers le but tendu. Le cœur vaporeux ne peut s’empêcher de douter, pourtant.

Un pied lentement devant l’autre. Ne jamais s’arrêter, ne jamais se retourner.

                             Mesure du temps usé.


Le poids de ce défilement incessant. Insensé. Un
poids qui s’enfonce dans le creux de ses reins. Un poids qui se perd.

                    Démesure du temps abusé.

Ne jamais s’arrêter. La corde rugit sous ses talons. Elle le secoue, le bouscule, le ramène à la vie, ultime. Intime dépendance.

Poser la vie.
Un instant.

Déroutante quiétude.
Ses pas continuent. Ne jamais se retourner. Une goutte au front il fait face. Il a le choix.

Folie ou solitude.
Conscience ou obsession.


Le vide.

lundi 3 octobre 2016

Chronique du livre de Katia Roessel, "Les yeux bandés"



katia roessel : les yeux bandés – Mémoire vivante 12, rue Lacuée Paris 12 ème  16 €

Dans un monde où l’assassinat politique de Pasolini n’a pas fait plus de vagues que cela, je salue ce livre dont la recension fait suite à la publication de Katia Roessel dans le n° 164. Cette réflexion m’est inspirée par «Cristal étoile» page 19, qui reproduit une phrase de l’invité divin dans Théorème, un des chefs-d’œuvre de P.P.P. : « au centre de la ville / il y avait une / fontaine nocturne / avec des larmes / limpides. /  dès lors je suivais / « le tour de bonté serait plus long à se reproduire qu’une étoile   » Les textes de Katia Roessel font irruption dans notre monde tels des météores. Cette image me vient à la lecture D’Or, page 50 où elle cite une phrase d’Hölderlin :  « mais l’espoir telle une étoile qui tombe du ciel traversa leurs esprits ». D’étranges jeunes femmes avec de l’or dans leurs cheveux qui dansaient des danses transcendantes, qui se tatouaient selon la nature car elles en faisaient partie, se dispersaient, se mêlaient aux siècles, s’y accordaient... Des muses sans doute car je lis que leur poème devenait homogène et aussi vaste qu’une orbite, un cercle de mœurs et de prières. Ce livre est dionysiaque en quelque sorte. Il commence par une célébration du printemps, temps de la libération du monde. Celui-ci est vu comme tombé d’une catastrophe.

Alain Wexler

samedi 21 mai 2016

LECTURE VERSO DU 3 JUIN 2016

La lecture Verso du vendredi 3 juin 2016 a réuni Alain Crozier & la revue Cabaret, Mermed et Marie-Ange Sebasti


Alain Crozier a été publié dans de nombreuses revues dont Verso. Un livre : Les cités magnétiques chez Jacques André. Le corps est très présent dans son écriture. Le corps du poème ou corps du désir plus l'art de la chute ou de la disparition. La revue Cabaret est un lieu à part. À suivre !



Lecture d'extraits de la revue Cabaret par Muriel Carrupt et Régis Evellier


Mermed est un traducteur  et voyageur infatigable. Inventeur de mythes. Mystificateur pour notre plaisir. Par exemple dans le dernier Verso, les destins croisés ou parallèles du Christ et de Bouddha.



Marie-Ange Sebasti vient de publier La connivence du marchand de couleurs chez Jacques André. Cette pure fiction nous tient toujours en haleine. "Désespère ton impatience / Retarde quelque temps / ta naissance / Apprends encore un peu / de la vie".

Photos : Josette Vial

dimanche 1 mai 2016

En ce lieu juste du jour d'après ... L'UNIVERS D'EVELYNE MORIN



En ce lieu juste du jour d’après

Les plus lointains silences se rapprochent
d’ailleurs
à la frontière de ce qui prend lieu

D’aucune autre apparence

Mais ici laissant
ce qui
sans nom
brûle au soleil
appelle le silence
miroitant du ciel

Une poussière d’être
Poussière légère
Rien qui subsiste
Mais en suspens
un soleil qu’on n’avait jamais vu
Poussière de lune
Poussière de nuit
Poussant la vie dérisoire
dans les recoins
de pièces anciennes
Rien provisoire
Et le vide appelle
rempli de désirs tant
qu’à choisir faut
l’angoisse
Rien retenu
au bord de s’élancer

Mais vient l’enfance
tardive
allumée à l’incendie
de cette nuit

Cela
obscurément possible
Poussière légère
Le mot échéant
Confronté à
maintenant
Épuisement du vide
happant tous les désirs
D’aucun désir
ne pouvant tisser
la trame

Ce mot qui se cherche
Ce mot qui me cherche
Là sur le vide
en attente
gris solitaire
d’un temps qui n’advient
Un livre peut-être
à écrire
qui ne serait
ni la nuit ni le jour
Mais cette fenêtre
grande ouverte
Et rien après
Qu’une pièce inexplorée
silencieuse
d’inquiétude

Le temps
sourd
Sape de ce qui est
passé
Déjà atteint
En suspens au bord du vide
miné par l’instant


            Évelyne Morin





Évelyne Morin, née à Tulle, vit en Essonne.
Poète, professeure de lettres, comédienne, elle a publié une vingtaine de recueils (dernières parutions : Matin de l’arbre levant, Le Nouvel Athanor, 2014 ; Le Bois des corbeaux (Photos d’Éliane Morin), Gros textes/Les Tilleuls du square, 2015 ; Ronde noire (illustrations d’Alexandre Hollan), est à paraître aux éditions Jacques Brémond.
Elle contribue à plusieurs revues, dont Les Cahiers du sens, Comme en poésie, Concerto pour marées et silence, revue, Décharge, Diérèse, Interventions à haute voix, Poésie/première, Souffles, Verso…), et anthologies (L’Athanor des poètes anthologie 1991-2011 par Jean-Luc Maxence et Danny-Marc (Le Nouvel Athanor 2011), Ouvrir le XXIème siècle, 80 poètes québécois et français Mœbius & Cahiers du sens 2013…)

Elle assure la programmation de Poésie&musique.orge (partenariat entre la MJC de Savigny-sur-Orge et la Compagnie Théâtrale Les Trois Clous).