lundi 8 février 2016

VERSO N°163




Au sommaire de ce numéro :

Tristan Allix, Patrice Blanc, Gabrielle Burel, Chloé Charpentier, François Charvet, Irène Duboeuf, Mélanie Fourgous, Hubert Fréalle, Michel Gendarme, Valérie Grégoire, Anéis Karouëne, Miloud Keddar, Kiko, Gérard Lemaire, Michel L'hostis, Lodi, Alain Jean Macé, Eric Von Neff, Didier Ober, Grégory Parreira, Christophe Petit, Patrick Picornot, Stéphane Robert, Nicolas Rouzet, Estelle Sciortino, Pauline Ségalat, Michel Serraille, William Shakespeare, Gildas Veneau, Florence Vivant, Sanda Voïca, Catherine Zittoun.




préface par alain wexler



Soyons hommes & femmes livres



Préface ou éditorial ? Un chef d’état retenu dans un lieu peu recommandable, pendant toute une nuit, un pistolet sur la tempe afin qu’aux pillards, son pays soit livré, où cela s’est-il vu, où cela s’est-il vu ? Que cette nation soit le berceau de la démocratie et du théâtre, est-ce un hasard ? Que ce fût là aussi que l’on célébra l’intelligence – lire l’Odyssée – que des hommes censés gouverner l’Europe refusent aux peuples de ce continent de choisir la façon dont ils seront gouvernés, cela s’est-il vu, cela s’est-il vu ? Oui malheureusement sous la botte nazie. Il faut que cela soit dit. Sinon quel sens donner à la liberté  ? Quelle poésie sans liberté ? La poésie est création, pas de création sans liberté ni démocratie. Il fallait que cela  fût dit. Le livre est liberté.

Le temps presse, soyons hommes et femmes livres, la formule est de Nicolas Rouzet. Sans les mots quelle serait ta place au monde ? écrit François Charvet. L’anaconda vient d’avaler le monde, il n’a pas d’yeux. On n’en a pas besoin pour avaler le monde ! Erich von Neff est plein de surprises. Dans cet ensemble de textes je ressentais comme une vacuité. Le retour au ciel au fil des pages n’y était pas pour rien mais celui-ci n’était qu’une aspiration vers la beauté. Souvent nous nous projetons dans le ciel comme dans un livre. Ce qui arrive dans un des textes de Pauline Ségalat, où la jeune femme qui voulait se baigner dans la mer et couverte de baisers par son amant crée sur son lit la fiction de cette baignade. Femme livre qui se mire dans un livre !
Des hommes et des femmes livres s’interrogent et se révoltent au fil des pages ou s’échappent vers ce quelque chose qui m’avait donné  l’impression d’une vacuité. La liberté, simplement.

  
 EXTRAIT : 


miloud keddar



Le refus



      La pierre aveugle est ce matin blanche, une coulée de lumière. Mais le passant prudent ne peut accéder à son chemin, la pierre est parfois d’une lumière qui se refuse.

(Le château de Crussol est la beauté en ses ruines, celle qui veut qu’en ses hauteurs on ne peut vivre)

Qu’écrire quand la voie se refuse, quand le signe est aveugle  ?
Le ciel est gris ce matin peut-être, je ne vois pas le jour, il ne pleut pas entre mes mains.

La ruine est ce qui te déchire, poésie. Le ciel est blanc cette nuit, pleuvra-t-il demain entre mes mains ?